Kendi en forme d’éléphant

Cet objet en forme d’éléphant assis, décoré de motifs bleu cobalt, gris bleuté et blanc a clairement été inspiré par un kendi, une sorte de gobelet chinois Ming de la période Wanli (1573-1620 [1]. Contrairement à ceux de Chine, cet exemple safavide est fait en céramique frittée plutôt qu’en céramique simple et les traits de l’éléphant ne sont pas très naturalistes.

Les kendis furent exportés de Chine vers l’Europe, l’Iran et l’Empire ottoman [2] où ils furent souvent copiés et adaptés pour correspondre aux goûts locaux. Bien que l’on ne sait pas clairement comment les Iraniens utilisaient ces récipients, ils auraient pu servir de base à des pipes à eau (ghalyan) ou simplement comme objets de décoration dans le style prestigieux chinois [3].

Kendi éléphantLes kendis chinois originaux appartiennent à une catégorie de porcelaine connue sous le nom de kraak*, d’après un navire de commerce hollandais qui transportait ce type d’ustensiles. L’Iran fut l’un des premiers pays à produire des imitations de kraak [4]. L’exemple présenté diffère des prototypes chinois à la fois par le matériel et l’exécution. Il est fait en céramique frittée au lieu de la porcelaine, et les traits de l’éléphant présentent peu de relief et sont moins naturalistes. La trompe enroulée que l’on peut trouver chez les kendis chinois est également absente. Cependant, dans les deux cas, iranien et chinois, le corps est surmonté par un tuyau cylindrique par lequel on tenait le récipient, alors que la courte trompe avait la fonction de bec verseur.

Ici, de la même manière que le kendi chinois, la décoration est exécutée en bleu cobalt, avec des contours gris bleutés, sur fond blanc enduit d’un léger vernis. Une selle en tissu bordée d’une frange et constituée de clefs grecques élaborées, avec de longs rubans terminés par des glands, recouvre le corps et le cou de l’animal. Le cou tubulaire est peint de motifs floraux, d’oiseau et de papillons. Lisa Golombek a donné le nom de style transitionnel à ce type d’ustensile bleu et blanc, sur lequel un motif bleu est surhaussé de gris bleuté ou de noir, et elle l’attribue à Kirman, dans le la deuxième moitié du XVIIe siècle [5].

Peu de kendis en forme d’animal de l’ère safavide ont été mis en lumière. Un exemple similaire se trouve dans la collection de l’Ashmolean Museum à Oxford [6].

Maryam Ekhtiar in [Ekhtiar, Soucek, Canby, and Haidar 2011]

  • Nom de l’objet : Kendi
  • Date : deuxième quart du XVIIe s.
  • Géographie : fabriqué en Iran, probablement à Kirman
  • Medium : céramique frittée peinte de teintes de bleu et recouvert d’un vernis transparent
  • Dimensions : H 23,2 cm, L 18,1 cm, Diam. 11,7 cm
  • Classification : Céramique
  • Credit : The Friends of the Department of Islamic Art Fund, 1968
  • Numéro d’accès : 68.180

Notes :

  1. Le kendi était basé sur un ustensile bouddhiste connu sous le nom de kundi, introduit en Chine par des moines bouddhistes indiens qui l’utilisait pour leurs ablutions durant les cérémonies religieuses. Les collections du Metropolitan Museum contient un un kendi similaire en porcelaine datant de la fin du XVIIe s. (acc. no. 2003.232).
  2. Le Topkapı Treasury à Istanbul possède plusieurs exemplaires de la fin du XVIe s. En 1609, Shâh Abbâs I en a offert plusieurs au mausolée de Shaikh Safi al-Din a Ardabil (aujourd’hui dans la collection islamique du Musée national d’Iran à Téhéran)
  3. Kraak Porcelain: The Rise of Global Trade in the Late Sixteenth Century and Early Seventeenth Centuries. Exhibition, Jorge Welsh, London; Jorge Welsh, Lisbon. Catalogue by Luisa Vinhais and Jorge Welsh. London, 2008, p. 321. Voir aussi Allan 1991, pp. 54 – 55.
  4. Vinhais et Welsh 2008 (voir note 3), p. 321.
  5. Golombek, Lisa. “The Safavid Ceramic Industry at Kirman.” Iran 41 (2003), pp. 253–70. Voir aussi Golombek, Lisa, Robert B. Mason, and Patty Proctor. “Safavid Potters’ Marks and the Question of Provenance.” Iran 39 (2001), pp. 207–36. L’attribution de Golombek est basée sur des preuves archéologiques et des analyses pétrographiques de tessons trouvés à Kirman et Mashhad, ainsi que sur des exemplaires signés existants par des potiers, conservés dans plusieurs musées et collections privées. Comme notre kendi ne possède pas de signature de potier, son attribution est basée seulement sur des preuves stylistiques et historiques.
  6. Allan 1991, p. 54, fig. 32.

* Selon Vinhais L. and Welsh (J: Kraak Porcelain: the Rise of Global Trade in the 16th and early 17th centuries. Jorge Welsh Books 2008, p. 17), « on pense que la porcelaine kraak est nommée d’après les navires portugais (caraques), dans lequel elle était transportée. Carrak — ou caracca en italien ou en espagnol — est lui-même considéré comme dérivé du’un mot arabe pour désigner le type de navire marchand utilisé dans le commerce méditerranéen de la Renaissance, qaraquir signifiant simplement “navires marchands”. »

(Texte traduit d’un texte du Metropolitan Museum)

Voir aussi :
« Kendi in the Cultural Context of Southeast Asia, A Commentary »

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